Profil provincial : Ontario
Claudette Colvin était une adolescente noire dans les années 1950. Elle a refusé de donner son siège dans un autobus où les places étaient réservées aux personnes de race blanche neuf mois avant que Rosa Parks fasse la même chose. Mme Colvin est reconnue comme une pionnière du mouvement des droits civils. « Je le savais à cette époque, et je le sais maintenant — le chemin qui mène à la justice n’est jamais facile », dit-elle.1
Des survivants et des survivantes de l’Ontario se battent depuis plusieurs décennies pour la justice. Ce fut un long parcours décevant pour eux aussi. En septembre 2004, le gouvernement de l’Ontario a annoncé qu’il fermerait les institutions pour les personnes ayant une déficience intellectuelle dans la province avant mars 2009. À l’époque, la Colombie-Britannique et Terre-Neuve-et-Labrador étaient les seules provinces à avoir fait de même. Le 31 mars 2009, le Centre régional de la Huronie, le Centre régional Rideau et le Centre régional du Sud-Ouest de l’Ontario avaient été fermés. Entre 2004 et 2009, Patricia (Pat) Seth et Marie Slark ont entamé des procédures afin de représenter des survivants et des survivantes de l’Ontario dans un recours collectif. Bien que les survivants et les survivantes aient gagné leur cause et que le gouvernement de l’Ontario ait été tenu responsable, bon nombre de survivants et de survivantes ont eu l’impression que justice n’avait pas été rendue. En particulier, le recours collectif n’a accordé que très peu d’indemnisation aux survivants et survivantes pour les nombreuses années de souffrance. Aucun survivant et aucune survivante n’a pu faire valoir sa cause en justice parce que le gouvernement provincial avait accepté un règlement. Pour en savoir plus sur cette affaire, examine la ligne du temps du groupe Remember Every Name (en anglais).
La route vers la justice a été un parcours épuisant pour les survivants et les survivantes de l’Ontario. Il est bouleversant de voir l’enthousiasme avec lequel les gouvernements et les promoteurs privés recréent des établissements institutionnels depuis la fermeture d’institutions en 2009. On trouve de nombreux exemples de communautés tenues à l’écart, de grands ensembles d’habitations collectives et d’établissements de soins de longue durée en Ontario. Ces endroits continuent d’isoler et d’institutionnaliser les personnes ayant une déficience intellectuelle. Ces lieux suivent les mêmes tendances que celles que l’on voyait dans les grandes institutions du passé. La recherche nous montre que les institutions créent des milieux où les personnes vulnérables sont soumises à de mauvais traitements.
Les institutions engendrent de la violence quand (elles) :
- sont utilisées pour gérer le soin de personnes « difficiles »;
- ses bâtiments se trouvent dans des régions isolées et éloignées des lieux où vivent d’autres gens ou quand les résidents et les résidentes sont socialement isolés de la collectivité;
- sont exploitées à des fins lucratives en vertu de règles très strictes;
- visent à réhabiliter des personnes;
- fournissent un logement à des personnes marginalisées;
- le personnel exerce un grand contrôle sur les besoins et fonctions corporels des résidents et des résidentes.2
« Il y a des personnes qui n’entrent dans aucune catégorie de maisons d’intégration, alors qu’allons-nous en faire? »
— Le conseiller Paul Raymond, qui parle de son appui au projet Apple Blossom Village
Il peut être difficile de reconnaître les mentalités et les modèles institutionnels quand on les voit. Ils peuvent être nouveaux, lumineux et brillants. Ils paraîtront également bien en photo et lors des cérémonies d’ouverture. Tous et toutes seront fiers de ce qu’ils et elles ont créé pour les résidents et les résidentes qui y vivront. Cependant, qui sera là pour protéger les personnes qui y vivent, quand tout le monde rentrera chez soi?
Le danger c’est que les décideurs de l’Ontario et la société en général ont oublié les leçons qu’ils auraient dû tirer des expériences horribles vécues par les survivants et les survivantes des institutions de l’Ontario. Les institutions existent toujours en Ontario et des personnes continuent d’être cachées. C’est pourquoi les survivants et les survivantes, les familles et les alliés sont outrés par la façon inexcusable dont leurs appels à la justice ont été ignorés et oubliés.
Institutions exploitées par le gouvernement pour des personnes ayant une déficience intellectuelle en Ontario
Établissement | Lieu | Année d’ouverture | Année de fermeture |
Centre régional de la Huronie | Orillia | 1876 | 2009 |
Oxford Regional Centre | Woodstock | 1905 | 1997 |
D’Arcy Place | Coburg | 1920 | 1996 |
Durham Centre | Whitby | 1950s | 1987 |
Pine Ridge Centre | Aurora | 1950 | 1984/85 |
Centre régional Rideau | Smiths Falls | 1951 | 2009 |
Centre régional du Sud-Ouest | Chatham-Kent | 1961 | 2008 |
Muskoka Centre | Gravenhurst | 1963 | 1994 |
Midwestern Regional Centre | Palmerston | 1965 | 1998 |
Centre de réadaptation pour adultes | Edgar | 1966 | 1999 |
Prince Edward Heights | Picton | 1970 | 1999 |
Northwestern Regional Centre | Thunder Bay | 1974 | 1994 |
Bluewater Centre | Goderich | 1976 | 1984/85 |
Nipissing Regional Centre | North Bay | 1975 | 1977/78 |
St. Thomas Adult Rehabilitation and Training Centre (S.T.A.R.T. Centre) | St. Thomas | 1975 | 1984/85 |
St. Lawrence Regional Centre | Brockville | 1975 | 1984/85 |
ÉTUDE DE CAS :
Centre régional de la Huronie (CRH)
« Au cours des 100 premières années d’exploitation du Centre régional de la Huronie, plus de 4 000 personnes ont perdu la vie entre ses murs. Il a été confirmé qu’au moins 1 379 des personnes décédées au CRH ont été enterrées au cimetière de l’institution; toutefois, à cause de la mauvaise tenue des registres et de l’élimination de nombreuses pierres tombales, on ignore le nombre exact de défunts et de défuntes, lequel pourrait être supérieur à 2 000 personnes. »
— Remember Every Name, consulté en 2021
Le Centre régional de la Huronie (CRH), à Orillia (Ontario), a été fermé en 2009. Toutefois, les survivants et les survivantes continueront de vivre avec les cicatrices laissées par les souvenirs de ce qu’ils et elles y ont vécu. Ils pleurent encore ceux et celles qui y sont morts. L’histoire du CRH, la plus grande institution du Canada selon la population, est un élément important de l’histoire du Canada. Contrairement à Woodlands, en Colombie-Britannique, les bâtiments du CRH sont toujours debout. Les survivants et les survivantes ont demandé au gouvernement de les détruire ou de les convertir en musée éducatif où l’on pourrait apprendre l’histoire de l’institutionnalisation au Canada. Pour les survivants et les survivantes, le bâtiment symbolise les atrocités inimaginables qu’ils ont subies; la lutte pour la pleine inclusion et justice n’est pas terminée.
Visite du terrain du Centre régional de la Huronie M3.V3
Plus de 19 institutions ont été ouvertes par le gouvernement pour fournir des soins aux citoyens et aux citoyennes ontariens ayant une déficience intellectuelle. Trois des plus grandes institutions de l’Ontario étaient le Centre régional de la Huronie, le Centre régional Rideau et le Centre régional du Sud-Ouest. Tu trouveras ci-dessous des liens menant à un film documentaire, à des histoires et à des livres en ligne que tu peux consulter afin d’en apprendre plus sur les institutions de l’Ontario. Tu peux également visiter notre page de ressources pour explorer en profondeur l’institutionnalisation en Ontario, d’hier à aujourd’hui.
Ressources
Pour en savoir plus sur le Centre régional de la Huronie en Ontario, consulte les ressources suivantes :
- Source : Enquête canadienne sur l’incapacité, Statistique Canada, 2021
- Source : Bibliothèque publique de Toronto
Trois questions à examiner
- Qu’est-ce qui t’a le plus choqué dans ce que tu as appris sur les institutions en Ontario?
- Quelles questions aimerais-tu poser?
- Qu’est-ce qui se passe au Manitoba qui montre que les citoyens et les citoyennes ont le pouvoir de changer les choses?